Les Rencontres Sciences de la durabilité sont une réunion annuelle, organisée par le secrétariat français de Future Earth, et visant à renforcer la communauté des sciences de la durabilité en France en créant un espace sûr pour la discussion, la réflexion, et le débat.
Cette année, l'événement a été organisé en collaboration avec le Centre national de la recherche scientifique (CNRS), Aix-Marseille Université, l'Institut de recherche pour le développement durable (IRD), Labos1point5, le Mouvement pour des savoirs engagés et reliés (MESR), et les anciens participants de l'école d'automne de Future Earth France. Au total, 130 participants se sont réunis en personne à Marseille pour remettre en question les pratiques de recherche actuelles, réfléchir à l’impact sociétal des sciences de la durabilité et à leur contribution aux changements transformateurs.
Pendant deux jours, les 28 et 29 juin, nous avons exploré les possibilités d'évoluer vers des pratiques de recherche plus transformatrices, ainsi que les défis qui en découlent, au cours de sessions animées par des réseaux et des collectifs engagés dans la recherche transformatrice.
Accueil par les organisateurs et hôtes
Avec :
Sandrine Paillard, Directrice du secrétariat français de Future Earth
Eric Berton, Président d’Aix-Marseille Université
Maryline Crivello, Vice-présidente d’Aix-Marseille Université
En ouverture de ces rencontres, Sandrine Paillard, Eric Berton, Maryline Crivello, ont mis l’accent sur le besoin auquel ces rencontres répondent, celui d’ouvrir des espaces de partages et de débats sur les sciences de durabilité. Face à une crise sans précédent, il est nécessaire de repenser les pratiques scientifiques autour des questions d’habitabilité et durabilité, et ainsi contribuer, de manière plus active et engagée, aux transitions sociétales dans un contexte de changement global.
Ouverture
Wolfgang Cramer, CNRS, comité d’organisation des Rencontres Sciences de la durabilité 2023
Les connaissances scientifiques accumulées durant ces dernières décennies ne laissent plus l’ombre d’un doute quant à la nécessité pour la science de dépasser une posture d’observation et de veille quant aux questions d’habitabilité. C’est à travers ce constat que Wolfgang Cramer insiste sur l’importance de développer dans espaces de co-constructions avec divers acteurs non-académiques afin de contribuer aux transformations profondes et nécessaires pour garantir l'habitabilité de notre planète.
Co-construire des villes durables en Afrique : exemples de projets d’aménagement dans le “grand Lomé” et à Kpalimé au Togo
Keynote de Coffi Aholou, directeur du CERViDA-DOUNEDON
Dans une session introduite par Olivier Dangles, Coffi Aholou présente les synergies qui peuvent être créées entre chercheurs, communautés locales et autorités pour mener à bien la transformation de la ville. À travers deux projets réalisés au Togo, Coffi Aholou explique sa démarche interdisciplinaire de co-construction qui consiste à inverser les rôles entre chercheurs et communautés locales: ce sont les communautés qui ont l’expertise et les chercheurs qui sont à l’écoute.
Quels dispositifs de recherche pour co-construire les connaissances et les transformations ?
Session animée par Olivier Ragueneau, CNRS
Avec :
Isabelle Arpin, INRAE, LESSEM, Grenoble
Patrick Monfort, CNRS, HydroSciences, Montpellier, OHM Littoral Méditerranéen
Samuel Robert, CNRS, ESPACE, Marseille, OHM Littoral Méditerranéen
Bruno Romagny, IRD, LPED, Marseille
Au cours de cette table ronde les participant.e.s s’interrogent sur les directions que doit emprunter la recherche pour mieux supporter la transformation de nos sociétés. En particulier, les différents intervenants débattent sur leur compréhension de la pluri- et de la transdisciplinarité, sur les défis rencontrés lors de leur travail au quotidien dans des structures de recherche innovantes, et sur des pistes pour élargir et améliorer les pratiques dans le futur.
Empreinte carbone de la recherche: perspectives et difficultés de la transformation des laboratoires et au-delà
Session animée par Céline Serrano, Labos 1point5, INRIA
Avec :
Tamara Ben Ari, INRAE, UMR Innovation et transformation des systèmes agricoles et alimentaires, Montpellier. Co-fondatrice du collectif Labos 1point5 / Directrice du GDR Labos 1point5
Antoine Hardy, Doctorant en science politique, Sciences Po Bordeaux
Alexandre Santerne, LAM, CNRS, Aix-Marseille Université
Organisée par le collectif Labo 1.5, cette session s'intéresse à comment dépasser le paradoxe d’une activité scientifique qui contribue aux problèmes socio-écosystémiques qu’elle étudie. Tamara Ben Ari, co-fondatrice de Labo 1.5, ouvre cette session en présentant la démarche du collectif et les enjeux visés. Alexandre Santerne, chercheur au Laboratoire d’Astrophysique de Marseille (LAM), expose les activités et réflexions d’un groupe de travail interne au LAM qui développe des actions afin de réduire l’impact carbone du laboratoire. En clôture de la session, Antoine Hardy expose quelques résultats de son étude doctorale, portant sur l’initiative Labo 1.5. Il met notamment en lumière les tensions entre une conception de “l’excellence scientifique” souvent perçue comme incompatible avec la décarbonation de la recherche.
L’historien·ne et la planète
Keynote de Christophe Bonneuil
Quel rôle l’histoire et les historien·ne·s peuvent-ils avoir face à des crises environnementales inédites et convoquant deux temporalités souvent mises en opposition: le temps sociétal et le temps géologique ? C’est par cette question que Christophe Bonneuil explore comment la perspective historique peut nourrir une réflexivité épistémologique et ontologique sur ce qui les lie humains et non-humains à une terre qui se soulève.
En quête de nouveaux récits : humanités et exploration des futurs
Session animée par Nathalie Blanc, CNRS
Avec :
Julien Blanco, IRD, SENS, Montpellier
Irène Langlet, Université Gustave Eiffel, Marne-la-Vallée
Mara Magda Maftei, Université de Bucharest, LAP | UMR 8177 CNRS-EHESS
Pour terminer la première journée, Nathalie Blanc anime une session qui explore l’ouverture de la recherche à d’autres disciplines non-scientifiques, et notamment à la littérature. Dans un premier temps, Julien Blanco expose les synergies et les différences entre sciences de la durabilité et humanités environnementales. Mara Magda Maftei montre comment les auteurs littéraires s’approprient des études scientifiques pour explorer de possibles futurs. Irène Langlet questionne les récits actuels et leur capacité à imaginer des futurs alternatifs.
Science et engagement. Jusqu’où peut-on aller?
La première session de la seconde journée est dédiée à discuter du rôle des chercheurs dans la prise de décision politique à travers les interventions de Hendrik Davi et Julia Steinberger.
Le rôle des scientifiques et des universités dans les transitions
Keynote de Hendrik Davi, Député LFI des Bouches du Rhône
D’un côté, Hendrik Davi, député et ex-chercheur, défend une division claire entre le politique et le scientifique. Selon lui, le chercheur se doit de produire des connaissances dans des directions démocratiquement décidées par l’ensemble de la société, mais il doit se tenir à l’écart de la prise de décision politique ; le scientifique n’a pas la formation et les connaissances nécessaires pour y prendre part.
Bien vivre à l’intérieur des limites planétaires : est-ce
possible ? Et comment ?
Keynote de Julia Steinberger, Université de Lausanne
De l’autre côté, Julia Steinberger, co-auteure du 6e rapport d’évaluation du GIEC, expose en quoi les scientifiques se doivent d'être plus engagés dans les processus politiques. Partant du constat que nous sommes arrivé.e.s à un moment unique de l’histoire de la vie humaine sur Terre qui nous oblige à faire différemment, elle affirme que le.la scientifique a le devoir moral de soutenir le mouvement populaire demandant une réponse politique adéquate à la crise climatique.
Quelle formation universitaire pour construire une société équitable et habitable ?
Session animée par Marie Pettenati, BRGM
Avec :
Angela Barthes, Aix-Marseille Université, IUT GB-ADEF
Esteban Coquemont, Étudiant à Grenoble INP Institut d’ingénierie et de management
Michael Toplis, CNRS, Président de l’Université de Toulouse
A travers trois interventions mêlant réflexion et exemples concrets, cette session aborde la nécessité pour les institutions universitaires de repenser le lien entre recherche, connaissance scientifique et enjeux sociétaux. Le défi est non seulement de dépasser, par une approche transversale, un modèle académique basé sur l’empilement de connaissances disciplinaires, mais également de recontextualiser politiquement les enseignements et efforts de recherche.
Diapositives
Angela Barthes
Michael Toplis
Regards de jeunes chercheur·e·s: de l’interdisciplinarité à l’engagement
Session animée par Anne-Gaëlle Beurrier, Université Sorbonne Nouvelle
Avec :
Marcan Graffin, Doctorant à l’Université Paul Sabatier – Toulouse III
Kenneth Nsah, Université de Lille
Julia Le Noë, IRD, iEES Paris
Dans cette table ronde de clôture, la parole est donnée à des jeunes chercheurs, pour une réflexion à l’intersection entre jeunesse, interdisciplinarité, et engagement. À travers leurs parcours respectifs, Julia Le Noë, Marcan Graffin, et Kenneth Nsah évoquent comment l’interdisciplinarité s’est révélée incontournable dans l’étude de problèmes complexes, évoquant une reconnexion primordiale entre dimensions géophysiques et sociales. Au-delà d’une simple approche méthodologique, les intervenants décrivent également l’interdisciplinarité comme une façon de participer, de manière plus critique et active, à définir les modèles de sociétés que l’on souhaite rendre durables.
Diapositives
Kenneth Nsah